Morphée ...

Athanase entra de nouveau dans la salle du conseil. Ses pas l'avaient d'eux-même ramené ici, alors qu'il faisait une fois de plus le tour de la caserne, de SA caserne à présent puisqu'il avait pris la tête de la Cross Guard. Ses pieds trainèrent légèrement sur le sol planchéié. La fatigue faisait cligner ses yeux dans l'obscurité de la salle, encore accrue par le crépuscule.

Le jeune homme tira une des chaises, située presque en face de l'entrée de la salle, et s'y assit. Il posa sur la lourde table, loin devant lui, la chandelle qui éclairait de sa chaude lumière ses déambulations dans ce recoin de la caserne où les fenêtres étaient presque inexistantes.

Il tenta de faire le point sur ce qu'il avait vécu depuis le matin. Les gens qu'il avait rencontré. Leur caractère. Les entraînements. Le tournoi à venir, surtout, occupait son esprit. Comment ses soldates allaient-elle s'en tirer ? Car Athanase ne se préoccupait pas tant de sa sécurité que de celle des autres, et celà depuis longtemps ... Sa soeur déjà lui reprochait de ne pas assez se ménager.

Toutes ces pensées s'entrelaçaient et s'emmêlaient dans son esprit. Ses yeux se fermèrent peu à peu. Il posa sa tête sur le plateau de bois de la table devant lui, et sombra dans le sommeil, terrassé par Morphée qui réclamait son dû.

La lueur changeante de la bougie peignait de rouge et d'orangé ses cheveux gris. Son visage paraissait sous cet éclairage plus pâle qu'à l'ordinaire. Pour quelques instants, quelques minutes ou quelques heures, l'inquiétude désertait ses traits, laissant transparaître ce que l'on avait tendance à oublier : sa jeunesse ...

Dans la salle du conseil, Athanase dormait.

La porte de la salle du conseil s'ouvrit en grinçant et Kerio pénétra dans la salle de sa démarche lente et posée, en s'appuyant sur son bâton de bois. Il vit Athanase qui roupîllait. Il soupira.

*ah ! mais que va-t-on devenir avec un chef pareil...*

Il s'approcha, avec la ferme intention de le réveiller, à sa manière, c'est-à-dire en lui assénant un gros coup de bâton pour lui faire passer l'envie de s'endormir dans la salle du conseil. Mais il arrêta son bras.

*Il faut tout de même avcouer qu'il a fait des efforts... Il a motivé ses troupes et tenté de resserrer son autorité sur les membres de la Cross Guard. Et il s'es entraîné avec Hélène et Rika... Il peut dormir un peu. De toute façon, je n'ai pas besoin de lui.*

Il comptait en effet s'attaquer à la consolidation des poutres soutenant l'édifice de la caserne, qui tombait en décrépitude.

*Après le plombier, le charpentier... Jusqu'où devrais-je encore m'abaisser, moi, l'ex-duc Kerio le Grand...*

Il songeait au passé, et ça le faisait sourire.
Il se reprit.

*Bon, je vais aller chercher une échelle dans la réserve. Je n'aurais pas son autorisation pour l'emprunter, mais je pense aps qu'il me garde rancune pour cela...*

Il sortit alors de la salle du conseil, la tête pleine de souvenirs du temps jadis où il régnait en maître sur son territoire.

Hélène, totalement désemparée et au prise d'un terrible dilemme courait à travers la caserne d'un pas fort titubant, comme à son habitude...
[résumé des épisodes précédents (http://marheaven.heavenforum.org/Les-quartiers-c2/La-caserne-Cross-f11/Entree-de-la-caserne-f12/La-fin-du-voyage-t107.htm)Alors qu'elle balayait la caserne pour passer le temps, quelqu'un a frappé à la porte. Mais cette personne, qui ne s'est pas présentée, semble posséder de pouvoirs bien étranges et surtout, une odeur traumatisante pour l'humbe disciple du Culte qu'est Hélène. Ne sachant pas alors s'il valait mieux ouvrir la porte ou laisser là le visiteur, elle partit à la recherche d'Athanase pour réclamer son avis]

Elle courait sans trop savoir où elle allait car, bien que la caserne ne fut extrêmement grande, elle n'avait pas la moindre idée de l'endroit où pouvait se trouvait le chef.
Au détour d'un couloir, elle arriva devant la salle du conseil et ... bouscula le doyen de la Cross, Kerio, qui sortait de cette sus-dite pièce, sans se presser, de son pas lent ordinaire, appuyant sa force d'enfant sur son bâton de bois noir. Celui-ci (Kerio, pas le bâton noir...) évita la jeune prêtresse de justesse.
Elle s'arrêta pour s'excuser, et lorsqu'il l'interrogea sur les motifs de son excitation, elle répondit , après avoir repris son souffle et avaler quelques rasades.

Quelqu'un ... derrière la porte !

Encore essouflée par sa course, elle fit une petite pause pour boire un coup, laissant Kerio tout étonné regarder derrière la porte de la salle du conseil, cherchant le "quelqu'un" dont parlait Hélène.

à l'entrée... quelqu'un frappe sur la porte... tournesol-r(hic!)-peu... j'ouvre ou pas ? ... demander conseil au ...chef...

Puis, elle s'effondra contre le mur, serrant contre elle les deux objets qu'elle avait encor dans les mains, soulagée d'avoir livré ce qu'elle avait sur le coeur.

Kerio se gratta le menton pensivement et essayait de reconstituer mentalement le discours décousue de la jeune prêtresse.
Apparemment, ce n'était pas derrière la porte du conseil que se trouvait l'intru dont elle parlait... Il s'agissait donc d'une autre porte de la caserne...
Il la regarda, effondrée sur le mur, essouflée et fatiguée d'avoir couru et baraguiné ces mots. Elle semblait très troublée et sans doute était-ce important...
Mais connaissant l'animal, ce pourrait très bien être un ustensile de nettoyage tombé contre la porte du placard qui faisait du bruit et laissait croire à la jeune fille, un peu dérangée, avouons-le, que quelqu'un voulait sortir de ce placard...

*Je ne vais quand même pas réveiller le "chef" pour cela...*

Mais avant d'en être certain, il fallait être fixé sur la porte en question

Où ça Hélène ? Sur quelle porte frappe-t-on ?

Rika jugea le moment opportin pour descendre des poutres du plafond ; elle descendit silencieusement, ne produisant qu'un léger courant d'air dans le dos de Kerio. Son meilleur endroit de repos était devenu, du toit de la caserne, aux poutres du plafond de la salle du conseil. [ si si, regardez ici
... ]

* Hinhin, Kerio n'est pas le chef ... Hinhin ... *

Elle prit son petit sourire mesquin que d'autres auraient pu définir comme "angélique", mais qui, quand on connaissait un peu plus Rika, devenait effectivement mesquin, se posta dans le dos de Kerio, et annonça :

"Moins fort, Kerio, tu vas réveiller le chef !..."

*Je lui parle comme je veux ! *

"Et pour ce qui est d'ouvrir la porte, je m'en occupes, puisque apparemment, tu n'est pas capable d'aller accomplir la requête d'Hélène ...", rajouta-t-elle de son ton qui donne le plus envie d'étriper cette gamine insolente envers le monde entier.

Elle s'éloigna en passant tranquillement à côté de Kerio sans craindre les représailles ; elle secoua la tête de négation , soupira et laissa échapper un petit " Fufufu, vraiment, les soldats de nos jours ..."

Elle sortit de la pièce en fermant soigneusement la porte histoire de laisser dormir Athanase pour pas qu'il l'embête dans ses plans machiaveliques, prit un petit air satisfait et se dirigea vers la porte ...

Un grincement. Puis le silence. Puis des bruissements, comme des paroles lointaines … Les bruits minuscules s’ajoutaient les uns aux autres, formant une toile de fond sonore, oh bien sûr pas grand-chose, mais tout de même … Athanase s’agita, dérangé par ce presque silence qui s’insinuait dans son sommeil. À la lisière de l’éveil, il entendit un son, très faible il faut l’avouer, mais il l’entendit bien : quelqu’un fermait la porte de la salle où il se trouvait.

Il ouvrit les yeux.

Pendant un instant, il ne se souvint pas de l’endroit où il était. Que faisait-il, endormi, dans cette pièce obscure et vaste, si cette table immense, seul ! La mince lueur de la bougie agonisante drapait d’une sensation de mystère les murs de pierre qui l’entourait, laissant dans l’ombre les recoins les plus éloignés. Ce n’était pas un lieu de la vie de tous les jours, c’était une salle magique, tirée d’un roman ou d’un conte de fée !

Puis la mémoire lui revint. Il s’était donc endormi ici ? Il se fustigea mentalement. Ce n’était pas le moment, ni le lieu, de se reposer. Il avait encore tant à faire …

Les bruissements qui l’avaient tiré de son endormissement se rappelèrent à lui. Mais cette fois il était bien éveillé, et put les identifier. Quelqu’un parlait derrière la porte. Ou plutôt plusieurs personnes. Il songea aussitôt qu’un problème se présentait. Quoi ? Il n’en avait aucune idée, mais il était de son devoir d’aller se renseigner, et résoudre ce souci avant qu’il ne prenne des proportions immenses.

Il se releva. Ou du moins essaya. Il était si fatigué … Non ! Ne pas refermer les yeux ! Dans un effort dont il ne se serait pas cru capable, il se mit debout d’un seul coup. Trop rapidement peut-être … Comme toujours lorsque l’on passe trop vite d’une position couchée à la station debout, la tête lui tournait. Il dut s’appuyer à la table pour ne pas tomber.

Au bout de quelques secondes, cela passa. Il s’approcha alors de la porte, et l’entrebâilla. Il se faufila dans l’ouverture et, le dos collé contre le battant, il observa ce qui se présentait devant lui. Hélène avachie contre un mur, Kerio qui semblait regarder au fond du couloir, comme s’il suivait encore des yeux quelqu’un qui était pourtant sorti de son champ de vision.

Que se passe-t-il ici ? demanda-t-il en se frottant les yeux, tentant d’en chasser toute trace de sommeil.

Ah, il était fort impressionnant, le chef de la Cross ! Les cheveux indisciplinés, les yeux se fermant de sommeil … Il avait tout bonnement l’air épuisé. Mais non, il ne l’était pas, il fallait simplement lui laisser le temps de se réveiller … Athanase, Athanase, tu veux faire honneur à ta fonction, tu veux te montrer fort … Mais pense que ton corps n’est pas sans limites …

Kerio se retourna et sortit de sa rêverie .Son chef venait de se réveiller... Mais il méritait assurément de dormir encore un peu...

*De plus en plus pathétique... mais où va-t-on ?*

Il entreprit de lui expliquer tout ce qui s'était passé en son absence:
l'arrivée dérangée d'Hélène et la manière désinvolte et insouciante de Rika de se saisir de l'affaire.
Athanase écoutait en luttant contre le sommeil. Puis, Kerio n'y tint plus.

Mais si je vous ennuie, dites le !
Pour ma part, je m'en vais rattraper cette insouciante avant qu'elle ne fasse une bêtise dangeureuse pour elle et pour la Cross...
Quant à vous, dormez, vous ne ferez rien d'utile si vous n'arrivez pas à supporter mon rapport oral...

Il se retourna prestemment et, entraînant Hélène avec lui (*elle est moins nulle qu'elle en a l'air, on ne sais jamais, elle ne sera peut-être pas de trop... Au pire, ça lui fera un bon entrainement...*), il se dirigea vers l'entrée de la caserne, suivant la voie ouverte par Rika.

Athanase écouta avec attention ce que Kerio lui expliquait. D’accord, il est vrai que ses yeux avaient une légère tendance à se fermer, et qu’il devait lever la main pour dissimuler un bâillement un peu plus souvent que de raison, mais tout de même … Il se concentrait, vraiment ! Il comprit que quelqu’un frappait à la porte de la caserne, et qu’Hélène ne savait pas si elle devait ou non ouvrir à cet inconnu. Quant au mot de « tournesol » qu’elle avait prononcé, cela restait un mystère pour son esprit embrumé …

Et le vieil homme s’énerva. D’un coup, comme ça, sans prévenir. Avant qu’Athanase ait pu réagir, lui dire que, contrairement à ce qu’il semblait croire, il lui prêtait une attention soutenue, Kerio était parti à toute vitesse, entraînant Hélène avec lui, et laissant son chef sur le carreau. Ce dernier voulut le retenir, mais l’ex-duc était bien plus rapide qu’il ne le paraissait au premier abord, et dans tous les cas beaucoup plus qu’Athanase dans son état actuel. Il ne put donc que le regarder s’éloigner, le suivant de ses yeux endormis.

Il se passa la main dans les cheveux dans une vague tentative d’y remettre un peu d’ordre, puis renonça. Il était encore appuyé contre la porte de la salle du conseil, pas tout à fait réveillé, plus complètement endormi non plus, mais fatigué … S’il n’y avait pas eu ce personnage mystérieux qui faisait peur à Hélène derrière la porte d’entrée, il aurait été se coucher directement, plutôt que de somnoler debout dans ce couloir comme un abruti, mais il était de son devoir de s’occuper de ce problème avant de même songer à prendre du repos. D’ailleurs, il n’aurait pas dû s’endormir … Une légère pointe de culpabilité le traversa. Il l’effaça de son mieux, prenant une grande inspiration pour se remettre les idées en place. Il se redressa. Il était réveillé. Ou du moins voulait s’en persuader.

Bon. C’était à lui d’aller voir qui était derrière la porte. Il se mit donc en marche, pas aussi rapide que ceux qui le précédaient, c’est certain, mais il avançait d’un pas ferme et régulier. Au fur et à mesure qu’il progressait vers l’entrée, ses idées s’éclaircissaient. Au bout d’un moment, totalement réveillé, il se mit à courir pour rattraper Kerio et Hélène. Il ignorait ce que Rika comptait faire, mais il s’en inquiétait un peu, et préférait ne pas arriver après la bataille … en espérant que cette expression ne soit pas à prendre au sens propre !