Enfin arrivée

Tout en baillant à s'en décrocher la machoire, une silhouette dissimulée par une ample robe noire parvint devant le château de Lestower. Repoussant sa capuche, elle dégagea sa longue chevelure d'un gris pâle avant d'esquisser un sourire froid.
Les minutes passaient, et la porte restait close, s'opposant à l'entrée d'Altaïr là où elle pourrait enfin trouver le moyen de se débarrasser de ces gêneurs que sont les humains. C'était... irritant, de devoir attendre de la sorte, adossée au mur. Encore heureux qu'il fasse nuit.
Au boût d'un moment, elle se décida enfin à appeler pour voir s'il y avait ou non quelqu'un d'encore éveillé.

_ Y'a t-'il quelqu'un ?!!

Première phrase de la journée. Satisfaite d'avoir tenu aussi longtemps sans émettre un seul son articulé, Altaïr se renfonça dans l'ombre, jouant un peu avec une rose noire sortie d'une des manches de sa robe, la faisant tourner entre ses doigts et la respirant avec délices. C'était son ärm, celui qu'elle avait volé cette nuit-là, et celui avec lequel elle pourrait étudier un certain nombre de malheureux. Et accessoirement tuer, même si cette idée était moins intéressante.

(un MPE qui parle !! O_O)

(C'est bon je m'en vais, si j'acceuil encore un nouveau, la reine me tuera... Je préfère laisser Hugar le faire ^^ Ou peut être Cristal tiens ? Vous pouriez devenir copine toi et Alta... sainte mère je m'y ferais jamais -_-')

La porte s’ouvrit lentement, dans un silence total. Quelqu’un avait dû graisser les gonds … c’était presque dommage. Une silhouette semblable à celle d’Altaïr apparut dans l’encadrement. Une longue cape noire, un capuchon relevé qui ne laissait apercevoir que quelques mèches aile-de-corbeau échappées d’un masque blanc.

Cristal ne vit pas tout de suite la jeune femme dissimulée dans l’ombre, mais quand au bout de quelques instants elle la découvrit, elle sourit derrière son masque. Un sourire cruel, comme à son habitude. Même allure générale, c’était … intéressant. Mais avait-elle seulement la même mentalité ? Si c’était le cas, cela pourrait s’avérer … une alliée de taille ? Oui, elle pourrait continuer à tisser sa toile, qui se refermait de plus en plus sur les misérables êtres qu’elle méprisait tant. Les humains.

« Oui, je suis là … Êtes-vous donc ici pour mourir … ou pour tuer ? »

Un bruit à peine perceptible troubla le silence, tandis qu'une silhouette encapuchonnée s'avançait entre les battants de la lourde porte, le visage dissimulé par un masque blanc. C'était... intéressant, de la regarder, un peu comme si Altaïr voyait une sorte de reflet, avec toutefois quelques différences. A sa voix, c'était également une femme, ou plutôt une jeune fille. Quand à sa question... elle était tout aussi intéressante. Cette fille... elle avait envie de l'étudier, mais plus tard. Pour l'instant, c'était sa clef pour entrer à l'Echiquier.

Sortant de l'ombre pour s'approcher de la jeune femme, Altaïr laissa un sourire glacial et vide d'émotions se glisser sur son visage. Sa chevelure gris pâle se balançait au rythme de ses pas, tandis que ses yeux d'or terni fixaient sans détour le masque, esayant de se représenter les traits derrière. Elle n'avait pas envie de parler, et essayait de repousser un peu le moment de sa réponse. Qui de toute manière ne serait pas vraiment une phrase. Elle avait fait assez d'efforts pour aujourd'hui.

_ Etudier... puis tuer.

Trois mots qui résumaient tout. Le meutre n'avait d'intérêt qu'en ce qu'il la confortait dans l'idée de l'inutilité des gens. Quel intérêt y avait-il à supplier quand l'on sait pertinnemment qu'on ne sera pas épargné, à appeler à l'aide des gens qui sont soit déja morts soit le seront bientôt ? C'était... ridicule ? Oui, mais pas seulement. C'était surtout... pathétique, affligeant.
Aprés avoir respiré une dernière fois la rose noire comme la mort, Altaïr la redissimula dans une de ses manches, indifférente à la légère caresse des épines sur ses cicatrices. C'était un contact rassurant... savoir que quoi qu'il arrive elle pourrait toujours étudier... tuer... tenter d'apaiser sa curiosité de ^ces êtres dont elle parvenait pas à se convaincre qu'ils étaient de la même espèce qu'elle.

Cristal observait attentivement chaque détail de la façon de bouger, de parler de cette potentielle alliée. Son sourire sans émotion alluma en elle des échos de visages impassibles qu’elle montrait parfois, quand la situation le demandait. Elle lui ressemblait vraiment … et pas que physiquement.

Cela fut confirmé par sa réponse laconique. "Étudier … puis tuer." ? Vraiment ?

Cristal repoussa négligemment en arrière son capuchon, laissant échapper un flot de cheveux noirs qui glissaient jusqu’à sa taille. Elle retira son masque, le gardant à la main, et plongea directement ses yeux jaunes dans les yeux dorés de la femme face à elle.

« Peut-être … êtes-vous semblable à moi ? » supposa-t-elle, de sa voix grave qui mettait la plupart des gens si mal à l’aise.

Elle sourit à son tour, sourire carnassier d’un fauve affamé sentant la chasse approcher.

« Vous méprisez les humains, n’est-ce pas ? »

Décidément, cette fille avait des points communs avec Altaïr. Mais, en même temps, elle semblait... plus humaine ? Non, c'était... autre chose. Quelque chose dans son sourire cruel ou dans sa voix grave. Elle semblait plus rattachée aux émotions que sa peu loquace interlocutrice. Et surtout, elle parlait plus. Obligeant par la même Altaïr à répondre, à faire des efforts qu'elle n'aurait de manière générale pas faits. Mais là, le but du jeu était d'entrer à l'Echiquier. Et elle y réussirait, même si il fallait pour l'instant faire le deuil de son silence.

_ Semblable... mais différente.

C'était vrai, cela sautait aux yeux. Du moins, cela sauterait aux yeux de quelqu'un qui regarderait au-delà de leur tenue, robe noire ample à capuche contre cape à capuchon, et d'autres détails. Mais en même temps, elles n'étaient pas semblables. Pas totalement. Cristal seblait plus cruelle et sujette aux émotions que la femme qui lui faisait face, les yeux comme le visage dénués de toute expression même lorsqu'elle souriait. Et sa voix était aussi creuse que le reste, un peu rauque et traînante sur la fin des mots. La jeune fille avait repoussé son capuchon, dévoilant une chevelure d'un noir de jais, puis enleva son masque, et laissant apparaître un visage aux traits fins et aux yeux jaunes, étrangement perçants. Comme ceux d'un animal fixant une proie potentielle.
Sa seconde question fit hausser un sourcil à Altaïr. Est-ce qu'elle méprisait les humains ? Elle ne se l'était jamais demandé, les considérant simplement comme des êtres à étudier, un moyen de comprendre une masse importante de comportements et réactions qu'elle ne comprenait pas... et, accessoirement, une gêne. Les bruits qu'ils faisaient, si discordants, à chaque geste, ce langage articulé qu'elle évitait au maximum d'employer, ces contacts hysiques si répugnants... Le meilleur moyen de mourir, avec elle, était encore de lui imposer un contact. Mais est-ce que pour autant elle les méprisait ? Non, pas vraiment. On ne méprise pas une mouche qui bourdonne à nos oreilles, mais elle nous gêne, et on la supporte jusqu'au moment où la patience est épuisée et qu'on l'écrase, ou du moins qu'on essaye. Pour Altaïr, les humains étaient des mouches qui bourdonnaient autour d'elle d'une manière particulièrement désagréable.

_ Pas vraiment. Ils ne méprisent pas les mouches, et ils écrasent pourtant.

Bon, puisqu'elle avait commencé à parler de manière "normale", c'est à dire en faisant des phrases, autant continuer. Déja, savoir qui était cette fille étrange serait utile, ne serait-ce que pour lui apposer l'étiquette qui pourrait lui éviter qu'Altaïr ne se défoule sur elle. Tant qu'elle n'aurait pas son nom, elle ne serait pas un être dont la présence était tolérable... voire pourrait se révéler agréable. Quoique cela, il y avait peu de chances que ça se réalise.

_ Quel est votre nom ?

Semblable … mais différente ? Cristal eut été déstabilisé par cette réponse sibylline, si toutefois être déstabilisée avait été dans ses capacités. Mais c’était quelque chose qu’elle ignorait totalement. Ou du moins … presque totalement. Elle s’humanisait au contact de Devon, et il lui arrivait de ressentir des émotions qui lui étaient auparavant inconnues … Était-ce un bien ou un mal ? Elle n’aurait su le dire, tant son bonheur comme sa souffrance étaient plus forts quand elle était avec lui. Comme s’il sublimait son existence …

Toujours est-il qu’elle ne comprenait pas ce que la femme face à elle voulait dire. Cette femme qui restait si froide même lorsqu’elle souriait. Cette femme qui avait une voix ne laissant transparaître aucune émotion. Et pourtant … Sur son visage si neutre apparut une réaction à la deuxième question de Cristal. Peu de choses, un léger haussement de sourcil, mais venant d’elle c’était déjà surprenant. On ne s’attendait pas à ce qu’une statue manifeste un signe quelconque d’intérêt au monde qui l’entourait.

La jeune fille redoubla d’attention, fixant Altaïr de son regard intense qui semblait ne jamais ciller.

La femme face à elle semblait réfléchir. Cristal attendait sa réponse, sans manifester la moindre impatience. Du moins pour l’instant. Ou plutôt, parce que cette femme aux cheveux gris lui paraissait appartenir au même univers qu’elle. Elle n’aurait jamais pu supporter un tel retard à répondre de la part d’un de ces humains normaux qu’elle méprisait tant, mais venant d’Altaïr cela ne la gênait pas.

Et la réponse arriva. Ouvrant de nouvelles perspectives à Cristal.

Sa première pensée fut qu’elle avait eut raison de considérer cette fille comme une alliée potentielle. Elle disait clairement qu’elle "écrasait" les humains ! Cristal, elle, souhaitait débarrasser Mär Heaven de cette engeance impure et insupportable. Elle méprisait tant les humains … Non, c’était même plus fort que ça : elle les haïssait ... Elle ne cherchait pas à savoir d’où lui venait cette émotion si violente, à vrai dire elle ne voulait pas savoir. Elle profitait du plaisir malsain que lui procurait cette traque sans fin ou presque, ne souhaitant que la poursuivre … à l’infini. Elle vivait pour cela, cela lui donnait un but, mais elle n’en avait pas vraiment conscience. Elle existait, voila tout.

Du moins, c’est ce qu’elle ressentait avant de rencontrer Devon.

Elle prit alors conscience du reste des implications de la réponse d’Altaïr. Elle n’avait aucun mépris pour les humains. Mais les détruisait pourtant. Cristal ne comprenait pas cela. Elle ne pouvait déjà pas envisager que quelqu’un qui n’appartenait pas à la masse grouillante n’ait aucun mépris pour ces créatures infâmes, mais se dire que malgré cela la femme face à elle voulait les détruire … Cela dépassait toute compréhension. Cela n’entrait pas dans son mode de pensée, et si elle ne changeait pas profondément elle ne pourrait jamais comprendre. Cristal était assez basique dans ses réactions : elle aimait ou n’aimait pas, conservait ce qu’elle aimait et détruisait le reste. Pas de demi-teintes chez elle. Enfin, elle était tout de même capable de jouer un rôle, dans un but à moyen terme. Elle était bien entrée à l’Échiquier, alors que tôt ou tard elle devrait également tuer tous ses membres pour se débarrasser enfin de l’espèce humaine ! Mais pour l’instant cela lui permettait de tuer, alors elle se faisait obéissante, même si cela lui déplaisait.

Elle ne comprenait pas Altaïr, mais cette fille lui plaisait.

« Je m’appelle Cristal … Je vais vous mener à la reine, c’est elle qui vous acceptera ou non au sein de l’Échiquier. »

Cristal jeta un dernier regard en coin vers Altaïr avant de se tourner vers l’intérieur du château. Elle y entra, faisant signe à la femme de la suivre.

Ainsi, la jeune fille se nommait Cristal... ce nom lui allait bien. Elle semblait aussi dure et pourtant aussi transparente que ce dont elle tirait son nom. Pas en ce qu'elle était insignifiante mais Altaïr parvenait si facilement à deviner son mode de raisonnement... Pour autant, ce n'était pas frustrant, cela aiguisait sa curiosité plutôt. Mais c'était une autre curiosité que celle qui lui faisait "étudier" les humains. C'était plutôt une occasion de se comprendre et d'accroître sa puissance... pour mieux écraser les mouches qui bourdonnaient autour de ses oreilles.
Dans son raisonnement, elle était comme un enfant curieux et cruel, qui arrache les ailes des mouches avant de les torturer puis les tuer, infligeant la souffrance sans la comprendre, juste pour apaiser une incompréhension de cette chose insignifiante qui faisait tant de bruit...
Sa voix creuse s'éleva à nouveau, laissant tomber un unique mot. Son nom...

_ Altaïr...

Son attention revint quand Cristal déclara qu'elle allait la mener à la reine, qui déciderait de son sort. La femme pensa vaguement que si elle n'était pas prise, elle s'en prendrait à l'Echiquier un peu plus tôt que prévu, avant d'avancer à son tour à l'intérieur du château. Plutôt imposant, elle ne prétait pas la moindre attention à ce qui l'entourait, avançant aux côtés de la jeune fille tout en rêvassant, sa robe produisant un infime bruit de tissu sur le tapis. Mais, même au milieu de ses fantasmagories, une question : comment allait-on décider de son entrée ?
Sa guide avait dû passer l'épreuve, elle lui dirait sans doute. A condition de parler... Dans un infime soupir intérieur, Altaïr posa sa question. Que de mots, que de bruit... c'était gênant...

_ Comment va-t'elle décider de mon entrée ?

La femme face à elle donna son nom à Cristal. Presque à contrecoeur à ce qu’il semblait, mais en vérité c’était le fait même de parler qui paraissait lui déplaire. Altaïr … Elle saurait s’en souvenir.

Les deux femmes s’avançaient en silence dans le château sombre et apparemment désert. Cristal savait par habitude que, même plein de gens pas forcément discrets, le château donnait toujours cette impression de vide, mais un vide pesant, en ce que l’on avait souvent l’impression d’être malgré tout surveillé. Ce qui était d’ailleurs sans doute le cas. La reine semblait accorder à la surveillance des Pièces une importance toute particulière … Elle commençait d’entrée de jeu par se méfier de ceux qu’elle avait sous ses ordres. Position extrême. Mais peut-être avait-elle raison …

Le silence fut finalement rompu par … Altaïr. Aussi surprenant que cela soit. Prenait-elle goût à la conversation, ou bien avait-elle simplement un ardent besoin de réponses ?

« Et bien, en général elle fait se combattre les deux derniers arrivés, pour jauger leurs capacités. Mais l’on peut perdre et être accepté … Moi-même j’ai perdu mon combat d’évaluation. Je n’ai pas entendu dire que jusqu’à présent quelqu’un ait été refusé. »

Elle se départit de son ton neutre et presque sympathique pour achever, son sourire prédateur revenant errer sur ses lèvres pâles :

« Cependant, cela ne veut rien dire … Je préfère ne pas imaginer le sort de ceux qui sont refusés … »

Et elle rit.

Ecoutant avec attention la réponse de Cristal, un lueur s'alluma un instant dans le regard d'Altaïr à l'idée de se battre, disparaissant presq'aussitôt. Sans plus émettre le moindre son, elle asquiesça vaguement pour indiquer avoir bien reçu le message, continuant à avancer d'un pas lent. Se reposant de l'absence de sons indiquant la présence d'humains.
Décidément, la jeune femme l'accompagnant semblait aimer le sang et la mort... au contraire de la femme aux cheveux gris qui l'accompagnait. C'était peut-être le principal obstacle l'empêchant de considérer sa compagne comme une aide potentielle. Si elle aimait, elle se rapprochait d'eux... de ces mouches géantes qui l'importunaient.
Pour l'instant, dédaignant ses habituelles rêvasseries, une nouvelle question hantait l'esprit d'Altaïr. Cette Reine, devant décider de son entrée, appartiendrait-elle à la catégorie des mouches ou mériterait-elle, non le respect - notion qui lui était aussi inconnue que la confiance ou l'amitié - mais son obéissance... pour l'instant ?

* L'Echiquier est-il essentiellement formé de personnes telles Cristal, ou y a t'il des mouches ? *

Un soupir intérieur traduisit ses interrogations, avant que, redressant la tête, elle ne pose son regard vide sur une imposante porte qui se rapprochait davantage à chaque pas... Là, enfin elle ferait le premier pas vers la destruction des mouches. Aprés les avoir soigneusement étudiées dans leurs fonctionnements les plus secrets.

[ Argh... Altaïr commence à m'échapper... avec ses délires sur les mouches ]

[ suite du topic dans la salle du trône : Accepter Altaïr ? ]